Sur une tartine au petit déjeuner, dans un pain au lait au goûter, sur des crêpes avec les copains, et j’en passe : que celui qui n’a jamais mangé du Nutella (certains préfèrent dire « La » Nutella) me jette la première noisette. Les Français consommeraient 26 % de la production mondiale de Nutella, ce qui en ferait son premier marché ! Oui mais, que contient réellement la plus célèbre des pâtes à tartiner, lancée en 1964 ? Où est-elle fabriquée ? Peut-on en manger sans se poser de questions ? Pour en savoir plus sur cet aliment donc raffole toute ma petite famille, j’ai fait des recherches et je vous livre ici tout ce que j’ai pu trouver comme informations pertinentes. Bonne lecture et en résumé… allez-y mollo sur le Nutella 😉
1) Le Nutella est un produit Italien : VRAI et FAUX
Ferrero est une marque italienne, mais le Nutella vendu sur le sol Français y est aussi produit, cocorico ! La célèbre pâte à tartiner est fabriquée dans une usine de Normandie, à Villers-Ecales, depuis plus de 50 ans… L’usine est d’ailleurs parfaitement visible sur Google Maps, mais si vous tentez d’en voir plus sur place ou en utilisant Street View, vous verrez que le site est caché derrière un épais rideau de végétation. Et il est facile de comprendre pourquoi l’usine est à la fois discrète (pas de panneaux « Ferrero » géants) et sécurisée : un tiers de la production mondiale de Nutella est assurée ici !
Mais comme vous allez le découvrir en lisant la suite, le fait de disposer d’un site de production en France est l’un des rares points positifs à retenir.
Et si le Nutella est fabriqué près de chez vous, les ingrédients proviennent d’un peu partout :
- le sucre utilisé dans le Nutella provient de betteraves Françaises,
- le lait est acheté en France et en Belgique,
- l’huile est acheminée depuis la Malaisie,
- le cacao est issu de Côte d’Ivoire, du Ghana et du Nigeria,
- les noisettes proviennent de Turquie,
2) Le Nutella, ce n’est que du chocolat et des noisettes : FAUX
Les noisettes et le chocolat, c’est en (très) petites quantités, pour donner un peu de goût et de couleur. Mais le Nutella, dans les faits c’est avant tout du sucre et de l’huile. Les proportions ne sont pas indiquées sur le pot (pas fou, on ne va pas effrayer les consommateurs) mais l’ordre dans lequel ils sont mentionnés est sans équivoque. Et une petite recherche confirme qu’à priori le Nutella c’est :
- du sucre (environ 55 %)
- de l’huile de palme (environ 18 %).
- Des noisettes (13 %, autant dire pas grand chose)
- Du cacao maigre (7,4 %, on frise la dose homéopathique)
- Du lait écrémé en poudre (6,6 %). Avec autant d’huile, c’est sûr que le lait entier serait de trop. Pourquoi en poudre ? Parce que ce serait dommage de mettre des ingrédients frais dans la recette, quand même ! Mais vous noterez que sur chaque pot de Nutella, vous trouverez sur la photo un beau verre de lait bien rempli et bien liquide ! Ce ne serait pas se moquer du monde, ça, franchement ?
En résumé, dans un pot de Nutella, vous trouverez beaucoup d’ingrédients peu coûteux, et peu d’ingrédients à forte valeur gustative et économique…
3) Le Nutella, c’est écologique : FAUX
Vous vous en souvenez peut-être, mais le Sénat avait envisagé une taxe sur l’huile de palme, pour limiter la consommation de cet aliment star de l’industrie agro-alimentaire. Projet finalement abandonné sur fond de lâcheté ministérielle… Or le premier avantage de l’huile de palme, c’est qu’elle ne coûte pas grand chose (actuellement moins de 700 $ la tonne pour celle qui vient de Malaisie), mais qui est aussi nocive pour votre organisme que pour les forêts entièrement rasées dans le seul but de planter des millions de palmiers à huile. Face à la prise de conscience en 2012 sur les méfaits de l’huile de palme, Ferrero a lancé un compte Twitter pour faire croire à une volonté de communiquer de façon transparente (compte fermé depuis, c’est fatiguant de faire croire qu’on est honnête), et un site internet qui me donne envie de vomir : noisette et chocolat sont mis en valeur comme des ingrédients principaux, et il faut descendre en bas de page pour y voir la mention de l’huile et du sucre. Un monticule dégoulinant de bons sentiments et de désinformation. Baptisé « Nutella parlons-en« , le site me fait penser aux « républiques démocratiques » qui n’en ont que le nom… « Parlons-en », mais le moins possible !
Je vous conseille par ailleurs la lecture des commentaires sur la page Facebook de Nutella (plus de 30 millions de fans, effrayant !). Vous y passerez de délicieux moments de communication bien corporate, de moquerie (pour ne pas dire dénigrement) des clients qui se posent les bonnes questions, et de réponses si détournées de la question originale qu’elles en deviennent mensongères. Nutella n’est pas un champion de la gastronomie mais il faut reconnaître une qualité à Ferrero : en matière de communication, ils savent faire. Ils sont aussi bien aidés par une grosse base de consommateurs sur les réseaux sociaux, dont beaucoup sont à se jeter avec hargne sur le premier qui ose poser une question ou remettre en cause la qualité du produit…
En guise d’exemple, voici un exemple d’un commentaire rédigé par le community manager de Nutella sur la page Facebook de la marque, en réponse à un client qui évoquait l’impact écologique et sanitaire de l’huile de palme :
« L’huile de palme est un ingrédient indispensable à la recette du Nutella. La substitution par d’autres huiles ne permet pas d’obtenir son onctuosité et une bonne conservation de ses saveurs dans le temps.
En ce qui concerne un éventuel substitut à l’huile de palme, le choix d’un oléagineux alternatif ne serait pas forcément synonyme de diminution d’impact environnemental. Remplacer l’huile de palme par de l’huile de tournesol, par exemple, reviendrait à utiliser 8 fois plus de surface agricole. Si on remplaçait l’huile de palme par de l’huile de colza, c’est 5 fois plus de surface agricole qu’il faudrait mettre en œuvre. »
Une belle tentative pour vous retourner le cerveau ! L’huile de palme présente en effet un excellent rendement à l’hectare mais elle est essentiellement cultivée sur des terres qui abritaient auparavant des milliers d’hectares de forêt et des espèces endémiques parfois menacées. En Indonésie notamment, c’est franchement la cata. Les photos et les données font froid dans le dos. Donc ton argument pseudo-écolo sur l’impact environnemental pour mettre en valeur l’huile de palme, tu es gentil monsieur Ferrero, mais tu vas te tartiner avec !
L’huile de palme devient rance beaucoup moins vite, c’est en effet parfait pour la conservation. Mais concernant l’onctuosité, certains concurrents font aussi bien avec d’autres huiles végétales (colza, tournesol…).
Si vous voulez comprendre pourquoi l’huile de palme est beaucoup plus intéressante pour les industriels que pour les consommateurs, je vous renvoie d’ailleurs à l’excellent article publié fin 2014 par National Geographic sur le sujet.
4) Le Nutella, c’est bon pour la santé : FAUX
Inutile d’aller plus loin que l’étiquette placée sur chaque pot de Nutella pour se rendre compte que sur le plan nutritionnel, c’est une catastrophe. Ce n’est pas vraiment un aliment sain, et il amène essentiellement à votre organisme des choses dont il n’a pas besoin – ou tous cas pas en si grandes quantités : en ouvrant le pot, oubliez, vitamines et éléments minéraux, dites bonjour au sucre et au gras ! Evidemment, si vous le consommez en quantités modestes, il serait malhonnête de dire que le Nutella représente un réel danger pour la santé.
Dans 100 grammes de Nutella vous trouverez :
- 57,6 grammes de glucides (du sucre, donc)
- 31,6 grammes de matières grasses (dont 11 grammes d’acides gras saturés, avec un effet peu sympathique sur le taux de cholestérol ). L’huile de palme ne serait pas aussi nocive qu’annoncé par certains (en tous cas pas plus que les autres acides gras saturés, comme le beurre), mais à condition de ne pas en abuser !
- 6 grammes de protéines, et ça c’est plutôt bien. Mais si vous aimez les protéines, mangez des oeufs (par exemple), ils en contiennent en proportion deux fois plus que le Nutella. Ou des sardines (oui je sais, dans un pain au lait au goûter ça le fait moyen).
- Et du sel (0,144 grammes), juste un peu.
Notez que sur son site, Nutella précise que l’huile de palme ne présente aucun danger sur la santé. On pourrait dire la même chose pour la cigarette : si vous n’en fumez qu’une, vous ne risquez rien… Le Nutella n’est pas dangereux non plus, à condition de le consommer en petites quantités, en particulier si l’on est un enfant ! On ne dévore pas un pot entier à la petite cuillère, OK ?
5) On n’a pas vraiment le choix : FAUX
Consacrer un article entier aux motifs qui doivent vous éloigner que possible du Nutella, c’est bien gentil, mais on fait comment quand on aime la pâte à tartiner ? On fait un sevrage ? Pas la peine ! Il existe plusieurs alternatives. J’ai par exemple découvert Nocciolata, un pâte à tartiner « sans graisse hydrogénée, sans colorant, sans OGM, ni conservateur, ni arôme de synthèse« . Et sans huile de palme : elle est ici remplacée par de l’huile de tournesol. Et, ce n’est pas la moindre de ses qualités, c’est un produit entièrement bio ! Pas mal, donc, sauf qu’un défaut de taille subsiste : le tarif complètement délirant, à peu près deux fois plus élevé que celui du Nutella. Comptez 10-11 euros le kilo contre 5-6 pour le Nutella. Et même s’il y a plus de noisettes que d’huile (contrairement au Nutella), le sucre reste le principal ingrédient de Nocciolata… Et le goût de cette pâte bio, que je trouve plus prononcé et plus naturel que celui du Nutella, et qui me satisfait, a en revanche déçu ma compagne et ma fille qui ne jurent que par… le Nutella, à mon grand désespoir.
Il existe également des pâtes à tartiner artisanales, mais elles sont encore plus chères… Sinon, vous pouvez aussi râper du chocolat et émietter des noisettes sur votre tartine, c’est simple mais efficace.
Bref, la pâte à tartiner idéale n’existe pas. Je finirai ainsi par un conseil qui s’applique à la majorité des aliments et boissons « plaisir », dont le Nutella : à consommer avec modération !
CONCLUSION : sur chaque pot est écrit « pâte à tartiner aux noisettes et au cacao ». Je propose de remplacer cette assertion d’une effrayante approximation par « pâte à tartiner au sucre et à l’huile de palme », histoire d’être complètement clair sur la composition réelle de cette cochonnerie vendue en pot, et dont chaque spot publicitaire aimerait faire croire qu’il contribue au bonheur, à la croissance et à l’équilibre alimentaire de tous les enfants…
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(Note : photo d’illustration principale par Janine – licence CC 3.0)